L’Aventure, c’est le nom du gîte où nous fûmes accueillis pour notre séjour dans les Champsaur. Situé à Pisançon, un petit bled à proximité de Saint-Bonnet, le plus gros village du coin, notre séjour y fut enchanteur. Dès notre arrivée, notre regard fut attiré par un mur de photographies datant visiblement des années 70. Elles représentaient des jeunes aux cheveux longs occupés à des activités diverses. Jean-Claude, le créateur du gîte, le constructeur serait le mot le plus exact, nous expliqua que l’infrastructure avait été montée de toutes pièces à partir de ruines. Notre hôte, à cette époque, accueillait des jeunes en difficultés (y en avait déjà), qui participèrent à la construction des locaux.
Jean-Claude a vieilli, et a passé la main à son fils Fabien.
Fabien, 35 ans, est un type formidable. Excellent cuisinier, il nous préparera tout au long du séjour, un florilège de spécialités du pays. Il s’occupa de nous malgré les élections municipales. Il faut dire qu’il était adjoint dans la précédente municipalité qui se représentait.
Lundi matin, après un copieux petit-déjeuner, sous les conseils de Fabien en ballottage, et sous un temps plutôt couvert, nous partîmes pour Prapic, un village situé tout au fond de la vallée du Drac, à une vingtaine de kilomètres de Pisançon. But de la randonnée, la remontée vers les sources du Drac Noir, vers un endroit nommé le Saut de Laire. Vers midi, nous mangeâmes devant une cabane pastorale, puis nous poussâmes un peu plus haut jusqu’à la base d’une curieuse cascade de glace en forme de main à l’index pointé. Cela nous permit de voir un chamois.
De retour au gîte, Fabien nous apprit que la météo prévue pour les jours à venir, n’était pas folichonne.
Mardi matin, comme prévu, il pleuvait. Je décidai que nous ferions du tourisme. Je proposai à mes camarades d’aller visiter la vallée du Valgaudémard pas très éloignée, avec pour but, de manger à midi à La Chapelle en Valgaudémard. Mais auparavant, je tenais à leur montrer une curiosité locale, la chapelle des Pétêtes (poupées en patois). Il s’agît d’une étrange église construite en 1740 par un artisan du pays qui décora la façade de curieuses statues naïves. Après la chapelle de Pétêtes, l’autre Chapelle, celle en Valgaudémard (il faut suivre) nous réserva une surprise, tous les commerces étaient fermés. Le temps d’aller voir une jolie cascade et de discuter avec des militaires en goguette, nous repartîmes en sens inverse en direction de Corps en Isère où nous trouvâmes un choix multiple de restaurants ouverts. Pour la petite histoire, Pascale nous avait conseillé un restaurant à Corps. Le problème c’est qu’elle ne connaissait ni l’endroit exact, ni le nom de cette fameuse auberge. En désespoir de cause, nous en choisîmes une au hasard. Le repas y fut excellent (pour le détail des menus, voir mon épouse, je n’ai aucune mémoire culinaire.) Nous rentrâmes au gîte tôt.
Mercredi, Fabien nous avertit que le temps allait s’améliorer dans la journée malgré la neige qui tomba toute la nuit. Pourquoi ne pas retourner dans le Valgaudémard. Nous irions jusqu’au bout de la route dégagée et pousserions en raquettes jusqu’au célèbre refuge hôtel du Gioberney. La rivière s’appelle la Séveraisse, et elle mérite bien son nom, la randonnée fut sévère. Les prévisions météo de notre hôte se révélèrent erronées. Le paysage avait radicalement changé depuis la veille. Impossible de pousser en voitures jusqu’où nous étions allés, trop de neige, la voiture de Robert dérapait. Une épaisse couche de neige collante recouvrait tout. Nous suivîmes un moment les vestiges des traces de skis laissés par les bidasses, mais bientôt nous dûmes faire notre propre trace. La neige était très lourde, c’était épuisant. Nous alternions la trace entre Paulo et moi. En fait d’amélioration, la neige s’était remise à tomber et se transforma vite en une véritable tempête qui dura toute la journée. Robert voulait faire demi-tour, mais je n’étais pas d’accord, je comptais trouver un refuge pour manger au Gioberney. Dans les lacets avant le refuge, nous surprîmes tout un troupeau de chamois aussi étonnés que nous, de rencontrer de humains par un temps pareil. Nous devions être les seuls dans toute la vallée. Après bien des difficultés, nous atteignîmes enfin la maison, où nous trouvâmes un abri sommaire sur des escaliers vaguement protégés des intempéries. Il caillait, si bien qu’après le repas, nous ne nous attardâmes pas pour faire la sieste. Nous retournâmes précipitamment, car la visibilité étant très réduite, nous comptions sur nos propres traces pour nous guider. Nous avions peur, vu la quantité de neige qui dégringolait, qu’elles ne s’effacent, ce qui ne fut pas le cas. J’étais pressé de rentrer au gîte pour dire à Monsieur Météo ce que je pensais de ses prévisions.
L’apéritif du soir fut émaillé par un incident imprévu. Paulo, parti en pantoufles pour fermer sa voiture, voulut éviter de marcher dans la neige qui s’était remise à tomber. Désirant passer sous l’abri d’une avancée du toit, il ne fit pas attention à la jolie poutre contondante qui débordait quelque peu. La rencontre entre la poutre et son crâne fut violente. Paulo se retrouva les quatre fers en l’air, les traces de ses mains dans la neige fraîche en furent la preuve. « Même pas mal » nous dit-il la tête en sang.
« - Poussez-vous, s’écria Jacqueline, je suis infirmière ! » Je suis marié depuis dix ans avec elle, je l’ignorais. J’avais pensé jusqu’à ce jour (à tort certainement), qu’elle était secrétaire médicale. « - Infirmière, secrétaire, c’est pareil, lança t’elle, réglant le problème d’un revers de main. » Les talents médicaux de Jacqueline joints à la cicatrisation exceptionnelle de Paulo, firent merveille. L’incident fut vite réglé, et nous n’eûmes pas à appeler le SAMU.
Mercredi, ce jour était important. C’était mon anniversaire, vingt ans……..d’Amis de la Nature. Le temps s’était légèrement amélioré durant la nuit. Je décidai de faire ce jour une petite randonnée sans raquettes. L’itinéraire prévu était le lac de Barbeyroux et les Infournas, retour par le col de la Blache. Une importante partie de la balade devait s’effectuer en forêt. Nous y trouvâmes pas mal de neige, ce qui fit râler mes collègues qui auraient préféré disposer de raquettes. Nous y arrivâmes quand même avec l’aide du GPS.
Aux Infournas, une éleveuse de brebis nous invita à assister à la séance d’allaitement des agneaux au biberon, ce qui fut l’occasion pour Pascale, d’effectuer de nombreuses séquences vidéo très bêlantes. Pour fêter mon anniversaire, Fabien nous avait préparé une raclette gargantuesque suivie, à ma grande surprise, d’un énorme gâteau aux poires et au chocolat. Il nous fallut trois jour pour en venir à bout. Tout y était, bougies, cadeaux et Clairette de Die. J’étais très ému, mes amis n’avaient pas oublié l’événement.
Jeudi, dernier jour pour Jacqueline et Robert qui devaient nous quitter prématurément pour cause de représentations théâtrales. Comme pour leur faire la nique, le temps était magnifique, plus un seul nuage dans le ciel. C’était la journée idéale pour nous enfoncer encore plus profondément dans la montagne champsaurienne. Après les sources du Drac Noir, nous irions à la découverte de celles du Drac Blanc, au fin fond de la vallée de Champoléon.
En bout de vallée, comme au Gioberney, faire la trace dans la neige collante fut éreintant malgré le temps très clément. Vers midi, nous étions encore assez loin du refuge du Prés de la Chaumette, but de la journée. Devant la fatigue, je décidai d’abandonner près de la cascade de Chaumeille. Comme nous en avions pris l’habitude avec André, nous fabriquâmes une tranchée circulaire dans la neige, dont le centre nous servit de table pour notre pause repas.
Le retour fut sans histoire. Au gîte, Fabien pour le dernier soir des susnommés, avait préparé un gueuleton de spécialités. Tout y était, oreilles d’ânes, tourtons …. avec des cuisses de canards confites. Nous quittâmes la table plus que repus.
Vendredi, la larme à l’œil, nous assistâmes au départ de Jaja et Robichon. Nous nous consolâmes très vite en pensant à la randonnée du jour, Molines en Champsaur et la vallée de la Muande. Il s’agit de l’itinéraire d’approche classique de l’ascension du Vieux Chaillol, point culminant du Champsaur avec ces 3163 mètres. Nous n’irions pas jusque là, heureusement. Nous remontâmes le Riou Beyrou jusqu’à un cirque magnifique, puis par un sentier très pentu nous grimpâmes dans la forêt jusqu’à un immense rocher où nous effectuâmes notre pause de midi. Cette randonnée concluait notre séjour dans le Champsaur.
L’heure était au bilan. Malgré une météo très aléatoire, nous occupâmes activement notre temps, et surtout nous nous rappellerions l’accueil inoubliable au gîte de Pisançon.
Au moment de partir, je pris une option auprès de Fabien sur le seul week-end disponible, à mi-juin. Ce week-end figurera sur le prochain programme.