19 mai, 2009

LE PRINTEMPS EN CHAMPSAUR (2ème partie : LA CROIX DE SAINT PHILIPPE)

Samedi 09 Mai.
Ce matin, le temps est le même que la veille, très mitigé.
Aujourd’hui, j’ai décidé d’emmener mes troupes randonner sur le plateau d’Ancelle, une des stations de ski du Champsaur. Fabien, notre hôte, m’a conseillé de passer par la croix de Saint-Philippe d’où un point de vue permet d’embrasser toute la région sur 360°. Donc, nous partons dès potron-minet (08h30) direction la dite station. Passé Forest Saint Julien, la route monte en lacet dans la forêt pour atteindre un vaste plateau herbeux. Le spectacle y est magnifique. Les abondantes pluies de printemps ont favorisé la pousse de l’herbe. Les prés sont colorés d’un beau vert tendre. Avec les cimes de l’Aiguille, de l’Arche et du Piolit encore partiellement enneigés en toile de fond, l’endroit ravit nos yeux. Nous garons bientôt nos véhicules sur un vaste parking au pied des télésièges désertés. Au début, le sentier monte au milieu des pistes de ski, ce qui nous permet de découvrir quelques objets hétéroclites perdus cet hiver par les skieurs sur les téléskis. En fait, ce qu’on voit surtout sous les télésièges, ce sont des mégots de cigarettes. Cette première partie de montée n’offre en fait guère d’intérêt, le site ayant été massacré par les bulldozers. Nous finissons quand même par atteindre la crête sous un soleil de bon augure. Nous devons encore escalader une draye au milieu d’un chaos rocheux avant d’atteindre la fameuse croix de Saint Philippe. Fabien n’avait pas menti, la vue est imprenable. Au sud, le regard porte jusqu’au lac de Serre-Ponçon où on distingue le pont de Savines. Au sud-ouest s’étend la ville de Gap. Et au nord, tout le Champsaur s’offre à notre regard. Il est temps de redescendre pour rejoindre le GR50 que nous allons suivre un moment. Au passage, sur notre droite, nous pouvons admirer un site archéologique. Il s’agit en fait d’un ancien oppidum celto ligure dont on voit encore clairement les enclos à bestiaux cerclés de monticules de pierres servant de barrières. Le chemin monte un moment vers l’Est et passe à proximité d’un lac artificiel creusé pour alimenter les canons à neige. Plus loin, en contrebas au sud, nous apercevons un curieux lac naturel celui-ci, peuplé de canards. Il est entouré de mottes de terre qui font comme des pointillés sur l’eau. C’est très bizarre. Le GR redescend maintenant en direction du col de Moissière où j’ai décidé (car je suis le chef), d’effectuer notre pause de midi. Je choisis un joli sous-bois herbeux deux à trois cent mètres avant la route. L’endroit est idéal pour farnienter sous le soleil, si soleil il y avait. Car l’astre mutin, tout comme la veille, joue à cache-cache entre les nuages, si bien que nous passons alternativement du chaud au froid et vice versa. Mais il ne pleut pas, c’est l’essentiel. En fait de pluie, le ciel nous laisse juste le temps de manger. Nous avons à peine fini le café que des gouttes commencent à tomber. Ceux qui voulaient faire la sieste en sont pour leurs frais. Il faut ressortir les capes de pluie. Pour ma part, prévoyant, j’ai pris soin d’apporter un parapluie pliant. C’est très pratique surtout quand les averses sont de courtes durées. Ayant rejoint la route sous la pluie, nous la suivons un moment en direction du nord, jusqu’au hameau de Moissière où un chemin à droite grimpe dans la forêt. Moi qui avais dit qu’il n’y avait plus de montées, je me fais allumer, surtout que la pente est raide. Heureusement qu’il ne pleut plus. Seulement, un coup de tonnerre inquiétant éclate en plein au milieu de la grimpée. A l’ouest, on voit clairement de denses rideaux de pluie s’approcher. On va s’en prendre une bonne. Et bien non, le coup de tonnerre restera solitaire, et la pluie passera au nord sans nous toucher. Nous avons de la chance surtout que le sentier s’est aplani et continue en balcon contournant le flanc nord d’une montagne joliment nommée « La Pinouse. » Nous entrons dans le vallon de la Rouanne, un torrent qui dévale des montagnes à l’Est pour poursuivre en direction d’Ancelle. C’est le moment de redescendre afin d’en rejoindre les berges où nous effectuons une dernière pause, adossés à des troncs de mélèzes coupés. Nous longeons ensuite la Rouanne vers l’aval. Au passage, Pascale et Jacqueline ramassent des bouquets de fleurs de pissenlits abondant dans le coin, dans le but de préparer une nouvelle mixture mystérieuse. Nous ne sommes pas loin d’Ancelle, pourtant malgré la proximité des habitations, j’ai la surprise d’apercevoir un court instant, un chevreuil venu s’abreuver dans le torrent, détaler devant nous. Arrivés au village, nous ne repartons pas immédiatement, nous nous rendons à pieds dans le centre afin de trouver un bistrot pour nous désaltérer. Voilà encore une randonnée de bouclée. Même si le temps n’a pas été extraordinaire, finalement, nous avons quand même eu de la chance. De retour au gîte, les filles trouvent encore le courage de répéter une danse médiévale qu’elles danseront prochainement lors d’une soirée costumée prévue fin mai. Tout comme la veille, à vingt heures, nous nous rendons au bord du lac de Saint Bonnet pour prendre notre repas au restaurant du plan d’eau. Fabien une fois de plus, nous régale de plats régionaux, dont le dénominateur commun est la crème abondamment présente dans les menus. Heureusement que nous nous dépensons dans la journée.


Dimanche 10 Mai.
C’est déjà notre dernier jour en Champsaur, il faut songer à plier bagages. Nous faisons nos adieux à Fabien. Nous nous donnons rendez-vous en octobre. Notre regret de partir est atténué par une météo tristounette. C’est devenu une tradition, lorsque nous rentrons des Hautes Alpes, nous avons pris l’habitude de faire une halte dans les gorges de la Méouge non loin de Laragne Montéglin. Cet arrêt coupe notre voyage en deux et nous permet de pique-niquer sur les berges de cette jolie rivière à côté d’un magnifique pont dit romain. Une fois le repas terminé et pour certains après avoir trempé les pieds dans une eau à douze degrés, je décide de faire une petite balade sur le sentier qui longe la Méouge. Cela terminera agréablement notre séjour. Le chemin en balcon est splendide. Tout le monde est content malgré un parcours plutôt accidenté. De retour aux voitures, c’est l’heure de nous séparer, chacun rentrant dans son bercail par la route qu’il aura choisie. Pour conclure, je tiens à remercier tous les participants de ce week-end enchanteur. Sans leur patience et leur bonne humeur, le séjour ne serait pas ce qu’il est, et malgré la beauté des paysages, nous n’en garderions pas un aussi joyeux souvenir. Je salue en particulier ceux qui n’étaient jamais venus avec moi, je pense en l’occurrence à Rose et Michel. J’ai bien vu que Rose avait un peu souffert, mais sans jamais se départir de son éternel sourire. Chapeau Rose ! Quand à Julie, elle m’énerve, elle marche plus vite que moi. Bon, je me console en me disant qu’elle n’a que trente ans. Non, plaisanterie à part, je remercie Marie-Pierre de nous avoir amené sa copine, elle a été plus que charmante, et d’une constante bonne humeur malgré cette longue promiscuité avec des vieux. J’espère que tout ce beau monde n’hésitera pas à réitérer cette expérience.

15 mai, 2009

LE PRINTEMPS EN CHAMPSAUR (1ère partie : LA VALLEE DE CHAUDUN)

C’est devenu une habitude depuis que nous avons découvert ce fameux gîte, nous y retournons fréquemment. Il s’agit du gîte « L’aventure » à Pisançon près de Saint Bonnet en Champsaur. Nous le faisons pour quatre raisons. La première évidemment, c’est pour les nombreux itinéraires de randonnées. La deuxième, c’est pour l’accueil. En effet, Fabien est un hôte hors du commun. Je peux le dire sans hésiter, c’est le gars le plus sympa qui nous ait jamais accueilli, et des gîtes j’en ai fréquenté dans ma vie. La troisième raison découle de la seconde. En plus d’être un garçon d’une grande gentillesse, c’est un cuisinier hors pair. Tous ceux qui sont venus avec moi peuvent le confirmer. La quatrième raison enfin est plus originale. C’est en effet la première fois qu’on nous propose des séjours à thème. Chacun se souvient en automne dernier, de notre week-end patrimoine où nous avons pu entre autre faire notre pain nous-même à la manière traditionnelle dans le four banal de la commune exceptionnellement allumé pour nous. A ce sujet, Fabien m’a proposé pour le premier week-end d’octobre prochain, de réitérer l’opération. Cette fois-ci nous pourrons assister à la fête organisée à Champoléon à l’occasion de la descente des alpages, et Fabien a offert de nous apprendre à confectionner les ravioles. Mais je n’en dis pas plus aujourd’hui, j’attends plus d’informations. Je compte aussi y organiser notre prochain réveillon de la Saint Sylvestre. Là aussi, je dois recevoir des informations sur l’organisation de l’événement.


Donc après ce préambule long mais nécessaire car ces choses devaient être dites, voici le récit de notre séjour proprement dit. N’en déplaise à certains qui, pour je ne sais quelles obscures raisons, préfèrent le Queyras, nous aimons nous retrouver dans cette superbe région qu’est le Champsaur. Cela dit, je n’ai rien contre le Queyras, bien au contraire j’adore aller y randonner.

J’avais décidé en ce week-end du huit mai, de partir le jeudi soir afin de profiter au maximum de notre séjour. Trois heures suffisent à peine pour accomplir le trajet, une grande partie se faisant sur l’autoroute. Je pense que le Champsaur est la montagne la plus proche de Toulon en temps d’accès.

Chacun avait décidé de partir de son côté en fonction de sa disponibilité. Avec mon épouse et notre amie Geneviève, en partant à 18h00 passée, nous étions bons derniers. Pourtant, malgré un embouteillage à Aix, nous arrivâmes à destination à 20h45 à peine.

Fidèle à son habitude et malgré l’heure tardive, un repas nous a été servi par le frère de Fabien ce dernier étant retenu au restaurant qu’il dirige près du plan d’eau du Champsaur. Nous nous couchâmes pratiquement tout de suite après le repas. J’avais demandé de préparer le petit-déjeuner pour 07h30.

Vendredi 08 mai :

J’ai décidé pour notre première randonnée dans le Champsaur, d’aller visiter la vallée de Chaudun qui paradoxalement n’est pas vraiment dans le Champsaur, mais plutôt à la limite du Dévoluy. Cela peut être un sujet de polémique, en tout cas la nature calcaire de la montagne est plus caractéristique du Dévoluy que du Champsaur qui est un massif granitique.

La météo prévue pour la journée n’est pas folichonne. Tant pis nous ferons avec.

Le ciel est plutôt gris, mais il ne pleut pas. Pour nous rendre à notre destination, il nous faut prendre les voitures et retourner en direction de Gap. Peu avant le col Bayard, une petite route grimpe à flan d’alpage en direction du col de Glaize point de départ de la marche. Au col, un parking marque la fin de la route bitumée. Après une petite erreur d’orientation, nous retrouvons le bon chemin qui par une large piste descend en lacet en direction de l’ancien village de Chaudun. Un petit mot sur Chaudun. Jadis peuplé de 150 âmes, ce village était tellement isolé que les habitants à la fin du XIXe décidèrent de vendre leurs terres à la commune de Gap et de partir vivre à la ville. La vallée fût abandonnée. La municipalité de Gap eut la bonne idée, étant donné qu’il n’y avait plus âme qui vive dans cette vallée nommée aussi vallée du Petit Buech à cause de la rivière qui la traverse, de la classer. Depuis sa préservation a été chapeautée par la communauté européenne et classée NATURA 2000. Il n’existe plus aujourd’hui à l’emplacement du hameau, que quelques ruines et la maison de l’ONF qui sert aussi de refuge. Cette préservation et l’isolement du lieu ont permis à une nature exceptionnelle de se développer. Nous en avons la preuve peu après le départ lorsque nous découvrons plusieurs marmottes en train de batifoler dans un pierrier juste à côté du chemin, endroit inhabituel pour ce genre de rongeurs. Les petites bêtes font la joie de Julie, une petite nouvelle qui n’en n’avait jamais vue jusqu’alors. Témoin aussi de cette nature préservée, un champ de fritillaires du Dauphiné, fleurs relativement rares, découvertes tout de suite après notre départ. Nous arrivons enfin dans le fond du vallon non sans avoir aperçu au loin un troupeau de bêtes que nous avons du mal à identifier du fait de la distance, chamois, bouquetin … ?

Après une petite pause près de la maison de l’ONF, nous repartons en essayant tant bien que mal de suivre un sentier mal balisé. J’entraîne mes troupes dans un premier temps le long du torrent, mais la sente est vraiment mal marquée. Un coup d’œil sur le GPS me permet de me rendre compte que je me suis fourvoyé. Demi-tour jusqu’au refuge sous les quolibets de la foule. De là nous montons en direction de l’ancien cimetière où subsiste le porche d’entrée de l’ancienne église, unique vestige étrangement dressé au milieu d’une prairie pentue. Au-delà des ruines le sentier se perd de nouveau. Heureusement en haut du pré, à la lisière d’une forêt de mélèzes, il me semble apercevoir un panneau de bois. Nous grimpons donc la rude pente et nous retrouvons le bon sentier au moment où deux randonneurs arrivent aussi, par le vrai sentier eux. Ils continuent leur chemin dans le même sens que nous, mais comme je suis obligé d’attendre les retardataires qui ont du mal à grimper le pré, je les perds de vue. Une fois tout le monde regroupé, je constate qu’il est déjà 11h30 et que les affamés ne vont pas tarder à se manifester. Ils ou elles se reconnaîtront. Je décide donc de faire la pause dès que nous trouverons un endroit adéquat. Nous continuons donc dans la forêt, puis le chemin se fait plus rude et nous entrons dans une gorge chaotique d’où se jettent de multiples cascades. Après avoir passé un gué, nous choisissons un amas de rochers pentus coincés entre deux torrents pour manger. L’endroit n’est pas très confortable mais ça ne fait rien. Pascale profite de la pause pour faire une cueillette de fleurs de mélèzes dans le but de préparer plus tard une mixture dont elle seule a le secret.

Après le repas, nous reprenons la montée pour atteindre un replat encore enneigé. C’est là que nous retrouvons notre couple de randonneurs qui redescendent et nous conseillent fortement de les imiter, le sentier plus haut étant, selon eux, impraticable. « Si vous allez au col du milieu, me disent-ils, il vous faudra des crampons ! »

C’est justement là où nous devons nous rendre. Je suis quand même un peu sceptique, les sommets au dessus de nous ne me semblent guère glacés. Je décide donc de continuer pour voir de visu ce qu’il en est, mais ces gens ont quand même réussi à me foutre les boules. Je me dis tout en montant que suivant l’endroit où nous risquons de bloquer, il va falloir tout refaire le chemin en sens inverse, et plus loin ça arrivera, plus longue sera la distance à parcourir.

Nous finissons quand même par sortir de la gorge pour atteindre un plateau tout vert d’herbe tendre. Qu’elle n’est pas notre surprise d’y découvrir plusieurs troupeaux de ces animaux que nous n’avions pas identifiés auparavant ! Il y en a partout autour de nous. Les plus proches gardent quand même une distance de sécurité de cent à deux cents mètres. Cela nous permet de les identifier, ce sont des mouflons. Depuis que je randonne, j’en ai rarement rencontré, encore moins en telle quantité. Julie est aux anges, nous aussi. Les appareils photos crépitent. Mais ma joie est pondérée lorsque je découvre au loin le sentier en balcon que nous allons devoir emprunter. Il est barré ça et là de névés très pentus.

Je prends la tête du convoi, car je veux tester moi-même les passages difficiles. Heureusement la neige est très molle et nous pouvons y marcher sans trop de difficultés. Je conseille tout de même à mes coéquipiers de bien planter leurs bâtons dans la neige au cas où ils viendraient à glisser, ce qui va bientôt arriver à Marie-Pierre, heureusement sans conséquences. En effet, plus nous avançons, plus le sentier est vertigineux. Ce n’est pas pour rien qu’il se nomme le chemin de ronde. Un moment, nous surplombons un à pic profond en bas duquel, tel un jouet minuscule, nous pouvons voir la maison de l’ONF, pourtant de belle dimension. J’ai pris un peu d’avance, talonné par l’inénarrable Paulo suivi comme son ombre par le jeune Julie, excellente marcheuse au demeurant. Les autres se sont arrêtés pour chausser leurs guêtres. Je m’impatiente car de sombres nuages se pointent à l’horizon et je ne voudrais pas être surpris par l’orage dans un endroit aussi minéral et désolé. Pour passer le temps je fais des photos des fleurs qui jonchent le parcours, notamment d’une très belle pulsatile de Haller, une anémone bleue assez rare elle aussi. Bientôt les névés s’espacent et nous finissons par atteindre le fameux col du Milieu où nous retrouvons la large piste que nous avons empruntée à l’aller. C’est tant mieux car il commence à pleuvoir. Nous n’avons pas eu besoin de crampons qui d’ailleurs, n’auraient été d’aucune utilité sur une neige aussi molle.

Je suis content de mes troupes, nous atteignons le col de Glaize couverts de nos capes de pluies.

La balade fût splendide malgré un soleil qui joua à cache-cache avec nous toute la journée.

Le soir, après la douche, nous allons prendre un repas revigorant au restaurant du plan d’eau. Une fois de plus, Fabien va nous gâter. (à suivre ….)