Reconnue la semaine précédente, j’avais peur que le temps ne soit pas de la partie pour effectuer cette randonnée. En effet, la météo avait été déplorable toute la semaine et les prévisions pour ce dimanche n’étaient pas folichonnes : beau temps le matin, dégradation l’après-midi. Enfin suivant le vieil adage « ce qui est pris n’est plus à prendre », nous avions au moins l’assurance d’effectuer la moitié de la balade sous le soleil. Pour une fois, les prévisions se vérifièrent et c’est sous un beau ciel bleu que démarra la journée. Nous étions 21 dont l’ami André, j’étais flatté car hormis les siennes, on le voit très peu dans les autres randonnées.
A un ou deux kilomètres après Méounes, une route étroite longeant un torrent tumultueux en cette saison, mène au lieu-dit Vigne Groussière.
C’est de là que j’ai choisi de démarrer la randonnée.
Nous suivons la piste un moment vers l’ouest jusqu’au hameau ruiné d’Agnis. Après une petite pause photos, nous attaquons par un étroit sentier, la montée vers le nord en direction du plateau d’Agnis.
Après avoir laissé sur notre gauche le sentier menant au garagaï du Signoret, nous atteignons le plateau sous un monstrueux pylône à haute tension, véritable verrue au milieu de ce paysage somptueux.
André m’avait dit qu’il existait jadis une sente menant au bord des barres rocheuses vers le sud, d’où une très belle vue s’offrait à celui qui se donnait la peine de s’y rendre. Le temps que les troupes se regroupent après la montée, je pars reconnaître l’hypothétique sentier.
En effet, André n’a pas dû l’emprunter depuis longtemps, car le tracé est plus qu’aléatoire. Qu’à cela ne tienne, la randonnée n’est pas très longue, je propose à ceux qui veulent me suivrent de poser leurs sacs qui seront surveillés par ceux qui préfèrent attendre notre retour.
Et nous voilà partis en direction du point de vue que nous atteignons après tout, relativement facilement.
André avait raison, le spectacle est grandiose. D’ici, le regard porte à l’ouest depuis la vallée de Méounes à Signes jusqu’à la mer au loin vers la presqu’île de Giens. Plus au nord le plateau de Siou blanc s’impose avec son sombre et épais manteau végétal.
Notre bonheur serait complet si notre position ne nous permettait pas de voir aussi arriver les nuages pronostiqués par Météo France. Il faut songer à faire demi-tour, car la randonnée n’en n’est qu’à son début.
Nous retrouvons nos amis restés au pylône après une absence d’à peine vingt minutes. Le temps que les quelques égarés restés en arrière nous retrouvent, nous redémarrons la marche.
Le sentier a fait place à une large piste détrempée en de nombreux endroits. Il faut souvent longer le bord pour ne pas patauger dans la boue. Nous arrivons bientôt au puits de l’Eouvière. Puis après avoir laissé sur notre gauche un spectaculaire lapiaz, nous décidons d’un commun accord de nous arrêter pour manger. Il n’est pas encore midi, mais les nuages sont déjà là. La pluie ne menace pas, mais j’ai peur que le froid soit de retour avec les nuées.
Mais ça va, notre pause s’effectue sans désagréments.
Ce n’est donc qu’après manger que nous atteignons le jas d’Agnis.
Il s’agit d’une ancienne ferme en partie restaurée où l’on peut trouver un abri pour les randonneurs, ce qui est exceptionnel dans la région. De plus, il est en assez bon état. Si on oublie la saleté, on peut très bien y passer la nuit, il y a une cheminée et des couchages.
A proximité du jas se trouve un élevage d’ovins. Les installations n’en sont pas du meilleur goût. Plus loin, nous quittons la grande piste, qui entre parenthèses n’est pas indiquée sur la carte IGN, pour suivre un sentier qui part en balcon au dessus du splendide vallon de la Foux. Avant d’y plonger, nous pouvons admirer la montagne de la Loube et plus loin les sommets enneigés des contreforts alpins.
Puis c’est la descente abrupte entre les rochers dolomitiques.
C’est peut-être la partie la plus belle de la randonnée.
Enfin, nous arrivons dans la plaine de la Roquebrussanne où nous retrouvons la civilisation. Une petite route goudronnée nous conduit au hameau de Fioussac. Nous quittons un moment notre itinéraire pour nous rendre à l’Est sur le site de la villa Marius, vestige gallo-romain, situé au milieu du domaine viticole du Loou, ce qui prouve que la vigne ici est exploitée depuis l’antiquité.
Ces ruines doivent leur nom à Marius Baudino, propriétaire du terrain qui les mit à jour en 1977. Une fouille y est effectuée de 1978 à 1983.
Il s’agit d’une ferme viticole gallo-romaine s’étendant sur 5000 m2.
Outre la vigne, on y cultivait l’olivier et les légumineuses.
Le domaine date de 46 av-JC. Il fut attribué à un militaire de la 6ème légion Romaine. Il fut ensuite occupé ponctuellement jusqu’au VIe siècle.
Après ce petit paragraphe culturel, revenons à la randonnée.
Oui revenons-y car les nuages se sont assombris et la pluie menace.
Il faut songer à rentrer avant la douche. Hélas, nous n’y couperons pas.
Il va falloir sortir les ponchos car bientôt le ciel ouvre ses vannes. Heureusement la pluie ne dure guère, une simple averse.
Nous avons quitté la route pour une piste qui nous ramène à Vigne Groussière et à nos véhicules.
Quelques uns d’entre nous retournent, en voiture cette fois, au domaine du Loou qui malheureusement est fermé le dimanche.
Mais nous avons de la chance. Le propriétaire est là, et devant l’affluence et peut-être la perspective d’un gain substantiel, il accepte de nous ouvrir exceptionnellement ses portes. Il ne le regrettera pas, nous allons le dévaliser. Il faut dire que son vin est très réputé dans la région, ainsi que son fameux marc de Provence de 15 ans d’âge, à consommer avec modération bien-sûr. Finalement, nous avons eu de la chance, depuis que nous avons réintégré nos voitures, il pleut sans discontinuer. Après un dernier arrêt à Méounes pour le pot de l'amitié, il est l'heure de regagner le bercail.